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Sida & ciné

- Editorial -

By Roxanne Avice - December 2017

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Le SIDA à l’écran a parcouru du chemin et si l’on peut se réjouir de la visibilité que le cinéma a pu donner à la maladie, je compte ici interroger la place du SIDA dans la culture cinéma LGBTQ+.

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Le Grand Prix du festival de Cannes 2017, 120 Battements par Minute (2017) a permis de remettre au goût du jour la thématique du SIDA qui dernièrement s’était faite plus rare à l’écran. Robin Campillo s’inspire de son passé d’activiste à Act Up Paris pour ce scénario qui met en lien homosexualité et SIDA de façon évidente. On a pu féliciter son œuvre pour l’hommage qu’elle rend aux militants d’Act Up Paris qui se sont battus pour rendre à la maladie la visibilité qu’elle mérite à l’heure où les rumeurs et préjugés les plus aberrants peuplait encore l’esprit des masses. Et de la même façon que ces informations déprimantes telles que guerres et autres catastrophes avec lesquelles on nous bombarde un temps pour les oublier ensuite dès que les médias portent leur attention sur autre chose, 120 Battements par Minute remet la problématique d’une maladie qui aujourd’hui encore tue plus de 3 000 personnes par jour au premier plan, ce qu’on aurait tendance à oublier.

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Sur fond d’histoire romantique, Sean, personnage principal incarne le stéréotype du personnage atteint par le virus : un jeune homme blanc, homosexuel, qui plus est dans les années quatre-vingt-dix. Bien que population particulièrement à risque, la représentation de l’homosexualité à l’écran très souvent associée au SIDA peut s’avérer parfois stigmatisante. Depuis que cette dernière est traitée au cinéma, il est rare de trouver des films sur la question qui ne fasse aucune référence à l’homosexualité. Inversement, il est rare de trouver des films LGBTQ+ sans trace de SIDA même si cela n’est pas l’objet du film. C’est en particulier le cas lorsqu’il s’agit d’homosexualité masculine. Le personnage homosexuel est presque irrémédiablement confronté à l’intolérance de son entourage. S’il ne doit pas faire face à l’homophobie, c’est sans doute dans un combat contre le VIH ou pour la reconnaissance de ses droits qu’on le retrouve. La problématique du SIDA s’avère d’ailleurs traitée de façon disproportionnée auprès de personnages masculins. Dans les faits, on trouve plus précisément des archétypes distincts au sein de la galerie de personnages LGBTQ+.

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Une histoire entre lesbiennes sera généralement très érotisée, et liée aux problématiques qui concernent l’image et le rôle de la femme en société, les choix qu’elles doivent faire afin de rompre ou d’adhérer à ces derniers. On ne traite d’ailleurs que très rarement du SIDA chez les femmes. Dans Carol (2015, Todd Haynes), pas de trace de maladie, nous sommes plutôt concernés par le sujet de la combinaison pour une femme au rôle de mère avec une identité lesbienne. Quant à La Vie d’Adèle (2013, Abdellatif Kechiche), on y retrouve un traitement très érotisé du personnage lesbien d’une façon peu réaliste et qui paraît adapté à un auditoire masculin hétérosexuel avant tout. On reste donc bien plus satisfait de la richesse du traitement des personnages lesbien dans Carol. Quant au personnage trans, c’est bel et bien

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d’intégration sont il s’agit. Céline Sciamma nous les fait remarquer dans Tomboy(2011) où il est question de la difficulté de vivre en accord avec son identité lorsque celle-ci n’est pas conforme aux attentes de la société. De la même façon, Xavier Dolan reprend ce thème avec Laurence Anyways (2012), et les trois heures durant lesquelles on suit le voyage de Lawrence dans l’appropriation de son identité féminine. Et si Xavier Dolan, ambassadeur célèbre de la communauté LGBTQ+ au cinéma nous épargne le SIDA, il n’en reste pas moins souvent partisan de la représentation des difficultés qui entoure le stéréotype du personnage gay et trans. Mais alors, toute personne appartenant à la communauté LGBTQ+ est-elle irrémédiablement vouée à encontrer ces difficultés ? Serait-il inconsidéré de vivre une vie simple et heureuse, sans prendre part à ces combats majeurs du fait de son identité ? Même dans un film aussi léger et plein d’espoir que Pride (2014, Matthew Warchus), le SIDA fait partie du tableau comme une menace toujours présente rappelée comme une fatalité au spectateur homosexuel qui bien que soulevé par l’espoir que donne le film, peut ressentir un certain malaise quant à ces menaces qui continuent de peser.

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Il convient tout de même de nuancer le propos de cet article qui n’a pas pour but de décrier la représentation nécessaire du SIDA à l’écran. On peut s’estimer heureux que la maladie ait fait ce chemin sur les écrans et, par ce biais qu’elle ait une place plus juste dans l’imaginaire collectif. On peut aussi saluer certains films comme Dallas Buyers Club (2013, Jean-Marc Vallée) qui traitera de la problématique sous un angle novateur. Cette fois-ci, notre héros n’est plus l’habituelle cible homosexuelle – bien que la communauté soit représentée parmi les personnages secondaires. Ici, c’est à un machiste hétérosexuel et homophobe que l’on a affaire. Ron Woodroof apprends que le SIDA n’est pas exclusivement une menace pour les homosexuels. Avec un mois d’espérance de vie, son but est de créer et de maintenir une sorte d’industrie pharmaceutique illégale pour permettre aux patients dans son entourage de se soigner autrement que par l’AZT qui peut entraîner des effets indésirables. Inspiré de l’histoire vraie de RonWoodroof, le film entends donc rendre hommage à ceux qui découvrent ce qui n’était pas forcément évident à l’époque, le fait que le SIDA n’est pas exclusivement une menace pour les homosexuels.

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J’espère donc que le cinéma continuera de traiter du SIDA tant que la maladie continuera de faire ses ravages. De la même façon le cinéma LGBTQ+ doit continuer de rendre visibles les problématiques auxquelles peuvent être liées les questions de genre et identité sexuel en société. Mais peut-on aussi espérer des perspectives moins fatalistes ou stigmatisantes pour les personnages LGBTQ+?

Unframed.

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